La jeunesse se jette dans la lutte contre la réforme des retraites

Lors de la manifestation du 7 février, beaucoup de  jeunes étudiants se sont montrés mobilisés et solidaires dans le cortège de l’UNEF, l’Union nationale des étudiants de France.  

Des étudiants dans le cortège de l’Union des étudiants de France. Crédit : JULIEN DE ROSA / AFP

Il est 13h à Strasbourg Saint-Denis, une heure avant le début de la manifestation les manifestants se dirigent vers Garnier. On entend au loin les voix et les chants dont l’écho naît de l’opéra. Le clapotis de la manifestation résonne déjà sur le boulevard. La vague semble reculer pour mieux s’abattre sur le pavé qui mènera à République. Les prostituées sont toujours postées devant la société générale de Strasbourg Saint-Denis, prêtent à la recevoir de plein fouet. Au loin, la rumeur du cortège émane déjà de Richelieu-Drouot. 

Dans une combinaison de Casimir une jeune femme, la trentaine, ambiance les grévistes CFDT et leurs 60 printemps au son des hits des années 2000. Les spectateurs postés sur les hauteurs du boulevard sourient. Les deux jeunes étudiantes qui s’étaient égarées dans les rangs de la CFDT se sont mises à l’écart pour attendre qu’ils passent et emboîter le pas.  

Un petit cortège suit la foule orangée, c’est celui de  l’UNEF. Les grévistes d’une vingtaine d’années chantent en cœur des paroles de 68 tandis que leurs aînés se trémoussent sur Britney Spear juste devant. Un jeune homme vêtu d’un gilet jaune hurle dans un micro  du haut de son camion, ses mèches bouclés tombent sur ses yeux. Il semble tenace du haut de son petit camion marqué du signe Renault. 

Sur la banderole du cortège on lit « Les jeunes contre la réforme des retraites » et on entend chanter derrière elle: «  Macron nous fait la guerre et sa police aussi, mais on reste deter pour bloquer le pays ». L’effervescence du groupe et les chants illuminent les visages. Planté sur la côte bretonne, le groupe aurait l’air d’une colonie de vacances. Mais dans le chahut du boulevard Saint-Denis, la légèreté de cette jeunesse semble porter d’autant plus la manifestation. La houle du groupe bat en rythme. Par interstices de dix minutes, le cortège enchaîne les sit-in de 30 secondes suivis de courses effrénées pour réformer le bras de manif qui se dirige vers République.

Le faubourg Saint Denis où ils se rendent les soirs de semaine pour boire des pintes à bas prix est noyé dans la foule, les prostituées se sont réfugiées à l’abri dans la véranda d’un PMU légèrement surélevée. Pas d’école buissonnière ou de préavis de grève dans leur secteur, certaines ne les rejoindront pas. 

Une lycéenne tient au creux de son coude une pancarte sur laquelle on peut lire l’espérance de vie moyenne des femmes et des hommes français aux plus faibles revenus : 80 pour les femmes, 71,7 pour les hommes. « C’est l’âge de mon papi» dit Marius, le logo de l’UNEF se déploie sur l’arrière de son sweat. Le cortège est embaumé des senteurs de cigarettes roulées mélangées à l’acidité des canettes fraîchement achetées à l’épicerie : « On veut de la bière 1664 pas la retraite à 64. » 

République. 

17h, la place de la République délie les cortèges. On vient se ravitailler en sandwich merguez et en café. Les jeunes se dirigent vers les vendeurs ambulants.. La place est calme, la tempête d’émeute n’est pas au goût du jour. 

Une lumière vient baigner les têtes qui décorent le socle de la statue centrale. Sous l’allégorie, des visages bien réels de lycéens et autres étudiants. On les regarde, ils prennent le soleil. L’un d’entre eux prend des airs de Rastignac prêt à défier le pouvoir. Le jeune homme, cheveux mi- longs, pantalon pattes d’eph, fume nonchalamment en empruntant une pose digne de 68. Il se lève et tend les mains vers les manifestants, mais le geste reste sans réponse. L’étudiante à ses pieds porte des lunettes de soleil, son visage est enroulé dans un foulard vintage, elle ne se donnera pas cette peine. Ils passent inaperçus dans ce tableau figurant les jeunes silhouettes de la république venues dans la lumière.

Pas le temps de grimper pour le cortège de l’UNEF. L’avancée reprend, il faut atteindre Bastille avant 18h. On reprend bientôt les micro sit-in et les courses. Le cortège est encouragé par les manifestants postés sur les trottoirs. L’énergie du courant attire jusqu’au cortège de nouveaux manifestants qui adoptent bientôt les coutumes de l’UNEF. Ces nouveaux petits cailloux sont polis dans l’énergie générale , le courant les entraîne vers Bastille. 

Sur une pancarte on peut lire : Sous les pavés, la plage

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