Facs bloquées : “J’ai peur que mon dossier ne soit pas crédible pour les autres universités”

INTERVIEW. Alors que la mobilisation se durcit en France après le rejet de la motion de censure, c’est au tour de l’université de Paris 8 de faire parler d’elle. Il y a quelques temps, des étudiants ont organisé un blocus à l’entrée de la fac. Face à cette situation, certains élèves s’inquiètent pour leur année universitaire.

Noémie Albert, étudiante en première année de licence de science politique, à l’Université Paris 8.
Photo : © Instagram

Déjà trois mois que le gouvernement a annoncé son projet sur la réforme des retraites mais la contestation ne semble pas faiblir. Après un passage en force de cette réforme avec l’utilisation du 49.3 la semaine dernière, c’est maintenant le rejet de la motion de censure qui a déclenché un nouveau mouvement contestataire partout en France. Et cette fois-ci, les Français et plus particulièrement les jeunes, sont prêts à ne rien lâcher. Entre grèves des enseignants, blocus à l’entrée des universités ou encore occupation des locaux, la situation est de plus en plus difficile ces derniers jours. 

C’est justement le cas de l’université de Paris 8 où de nombreux étudiants ont décidé de bloquer la fac durant la journée d’hier. Il s’agit du deuxième blocus en seulement quelques jours. Face à eux, un certain nombre d’étudiants se montrent soucieux quant à la tournure des évènements. Noémie Albert, étudiante en première année de licence de science politique à Paris 8, fait partie de ceux qui s’inquiètent pour leurs poursuites d’études.

Étant étudiante en licence de science politique, est-ce que tu te considères comme quelqu’un de politisé ?

Oui, je le suis un peu parce que sinon je ne serais pas inscrite dans cette licence. Par contre, je trouve qu’il faut savoir faire la part des choses entre les études et notre opinion politique. Justement, ce n’est pas toujours le cas à l’université de Paris 8 qui est assez politisé, et je trouve cela parfois problématique.

Que penses-tu de la mobilisation des étudiants de l’Université Paris 8 ?

Je trouve que c’est une bonne chose car ça montre que la jeunesse est au courant de ce qu’il se passe dans le pays, et puis ça permet aussi de voir qu’elle est prête à agir et qu’elle ne subit pas ce qu’il se passe. Par contre, ce que je trouve regrettable, c’est qu’ils vont jeter la pierre à ceux qui ne veulent pas se mobiliser, et donc je trouve qu’il y a un certain extrémisme dans leurs actions parce que cela va empêcher certains étudiants de suivre leur cursus normalement. Je trouve ça dommage de tout le temps bloquer et de montrer du doigt ce qui préfère rester en retrait de ces mobilisations alors qu’on ne peut pas obliger quelqu’un à adopter une opinion qu’il n’a pas. Et puis il y a un certain manque de communication par rapport à ce qu’il se passe dans la fac mais aussi avec les professeurs qui nous disent au jour le jour si on a cours ou non, donc c’est assez embêtant pour s’organiser.

As-tu déjà participé à l’une de ces mobilisations ?

Non, tout simplement parce que je ne suis pas totalement en accord avec la mobilisation. Par exemple, je suis contre le fait de bloquer une fac, c’est une des raisons pour laquelle je ne me suis pas ancrée dans le mouvement étudiant de Paris 8. Après si ça venait à continuer, je pourrais me mobiliser mais plutôt dans l’idée d’échanger et de discuter. 

Est-ce que tu trouves que cette mobilisation et ces blocus impactent tes études ?

Oui, forcément. Tout le monde trouve que c’est trop cool de ne pas avoir cours mais là ça devient de plus en plus régulier. Pour ma part, j’ai loupé une quarantaine d’heures depuis le début de la mobilisation et ce n’est plus drôle parce qu’on loupe des cours qu’on ne va jamais rattraper, donc on est en train d’accumuler énormément de lacunes. Nos partiels sont sans cesse reportés eux aussi. On se prépare à une échéance qui est toujours reportée et on ne sait jamais quand est-ce qu’on va réellement les passer donc c’est très démotivant. Avec ce rythme, je n’ai plus envie de travailler et ça devient vraiment compliqué de se motiver. 

Est-ce que tu es inquiète vis-à-vis de ton année ?

En soi, je n’ai pas peur de louper mon année parce que j’ai eu des bonnes notes au premier semestre et qu’elles pourront compenser avec ce semestre si c’est nécessaire. Par contre, ce dont j’ai peur, c’est que mon dossier ne soit pas crédible pour les autres universités. Pour être honnête, je n’ai pas envie de rester à Paris 8 l’année prochaine, j’aimerais bien aller dans une autre licence de science politique qui serait plus accès sur le droit. Si je prends l’exemple d’Assas, il faut avoir au minimum 14 de moyenne générale sur l’année. Et je me dis que si mon dossier est faussé à cause des mobilisations, ça va m’embêter pour ces sélections. Puis il faut aussi voir plus loin avec la sélection en master qui est de plus en plus exigeante. Si on est catégorisé comme ceux n’ayant pas passé les partiels et n’ayant pas suivi tous les cours, ça va être compliqué d’être légitime face à d’autres étudiants

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